La méthanisation dans l'agriculture

Tout d’abord, je tiens à préciser un point absolument primordial. Un agriculteur doit vivre de son travail. À la manière d’un garagiste qui vit de son garage, d’un plombier qui vit de son activité de plomberie, d’un maçon qui vit de la construction de bâtiment, un paysan doit vivre des denrées qu’il produit, sinon il n’est pas un paysan mais un producteur d’énergie. Le principal problème c’est que la production d’énergie est un prétexte pour baisser le prix des denrées car ce sont devenus des sous-produits de la production d’énergie. Ceci crée une concurrence déloyale pour les autres agriculteurs pour qui les denrées sont la source primaire de revenu. Un garagiste ne baisse pas ses tarifs sous prétexte qu’il a installé des panneaux solaires sur le toit de son bâtiment. La production d’énergie est et doit être un complément de revenu à ne pas prendre en compte lors de l’achat de la production. Qu’est-ce que la méthanisation ? Je cite ici le site du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation : « La méthanisation est un processus biologique permettant de produire une énergie renouvelable, appelée le biogaz, par la dégradation de matières organiques par des bactéries dans un milieu sans oxygène ». Dans la nature, les matières organiques se décomposent pour former de l’humus et du gaz. La méthanisation exploite ce processus afin de produire ce que nous appelons du digestat et du biogaz. Voici un graphique produit par mes soins pour schématiser le fonctionnement d’un méthaniseur. Une unité de méthanisation s’organise en trois parties : un bâtiment de stockage, un digesteur et un local technique. Le bâtiment de stockage permet d’entreposer les matières organiques qui sont contrôlées et triées. Les matières conforment iront par la trémie d’incorporation alimenter le digesteur. Ce dernier peut être une cuve horizontale ou verticale ou bien une fosse. Sa température est maintenue entre 20 et 60°C afin de permettre la digestion par les bactéries. Celles-ci sont issues des déchets eux-mêmes, plus particulièrement des déjections animales. Elles assurent une digestion anaérobie des matières organiques, c’est la fermentation. La qualité du biogaz et du digestat est sans cesse contrôlée.
Enfin, le local technique permet de s’assurer du bon déroulement de ce processus. Y sont aussi présents des compteurs d’énergie qui sont vérifiés par une entreprise spécialisée afin d’éviter les erreurs de facturation aux consommateurs. N’importe quel type de matière première n’est pas forcément accepté pour la méthanisation. Les matières organiques sont catégorisées en trois catégories en fonction de leur dangerosité pour la santé humaine et l’environnement. Les matières présentant des risques importants pour la santé publique ne peuvent pas être utilisées. Certaines matières dangereuses peuvent être utilisées après un traitement spécifique. La réglementation est très stricte sur ce point et les matières premières sont contrôlées systématiquement. Source : ADEME, octobre 2019 La principale valorisation du biogaz est la production de chaleur et d’électricité combinées. L’agriculteur peut, par exemple, utiliser la chaleur générée par le processus pour chauffer des bâtiments dans sa ferme, cela permet d’utiliser directement cette énergie et de ne pas la gaspiller. Le biogaz est composé en moyenne de 55% de méthane (CH4), 40% de dioxyde de carbone (CO2) et 5% de divers gaz. Il peut être épuré de certains composant et être ainsi transformé en biométhane Le digestat est épandu comme un fertilisant après (ou non) une phase de compostage à l’air libre. Il est très riche en azote et est composé de matières organiques non dégradées, de minéraux et d’eau. La méthanisation transforme l’azote organique en azote minéral qui est bien plus assimilable par les plantes. Contrôler la qualité du digestat est une nécessité. Les unités de méthanisation étant de plus en plus utilisées par un regroupement d’agriculteurs, le risque de transmissions d’agents pathogènes, notamment la salmonelle, d’une ferme à une autre existe. De même pour les métaux lourds qui peuvent se retrouver dans le digestat et ensuite être épandus sur le sol, ce qui provoque des problèmes lors de la cultivation des plantes et peut avoir des effets néfastes sur la santé des consommateurs. Les contrôles doivent ainsi être particulièrement stricts afin d’éviter tout risque de contamination, préjudiciable aux sols, à la production et même aux consommateurs. Avant d’être vendu, le digestat doit faire l’objet de contrôles et obtenir une autorisation de mise sur le marché. Cependant, pour être épandu directement, seul une autorisation préfectorale est nécessaire, sans contrôles obligatoires. Une évolution de la législation est envisageable à ce niveau-là même si le risque de contamination est extrêmement faible si les produits sont contrôlés en amont. Avant épandage, il faut réaliser des études du sol afin de déterminer les caractéristiques que le digestat doit avoir pour cet endroit. Un plan d’épandage doit être mis en place par l’agriculteur qui peut être contrôlé à tout moment. Cette production d’énergie est renouvelable et permet d’apporter les déchets de nouveau à la terre afin de produire de nouvelles matières premières et donc de résidus à méthaniser et ainsi de suite. Ce procédé permet de compenser les émissions de gaz à effet de serre liées à l’agriculture en produisant une énergie complètement verte. Un méthaniseur traitant 15 000 tonnes de déchets par an permet de chauffer 500 maisons ou d’alimenter 60 bus urbains en carburant. 710 unités de méthanisation ont été recensées en France au 1er janvier 2019. D’après le ministère de l’agriculture, 150 millions de tonnes de déjections sont produites chaque année par les élevages français. Stockées sans traitement, ces déchets seraient responsables de 13% des émissions agricoles en méthane. Capter ce gaz et le revaloriser s'inscrit de plus dans la lutte contre le dérèglement climatique. Ce processus provoque certains désagréments d’ordre pratique. Cela induit par exemple une certaine pollution olfactive par le fait de concentrer autant de déchets organiques au même endroit et de les faire fermenter. Des arrêtés encadrent les odeurs produites par ces usines. Un an après l’ouverture de l’usine, un compte-rendu prenant en compte les désagréments odorants doit être fait. L’impact visuel sur le paysage et l’augmentation du trafic routier afin de faire fonctionner l’usine de méthanisation sont aussi à prendre en compte lors de la construction d’une nouvelle usine. La méthanisation permet de réaliser des économies pour l’agriculteur dans le traitement des déchets : brûler ou stocker les déchets non dangereux revient à une centaine d’euros la tonne tandis que les traiter par méthanisation coûte une cinquantaine d’euros la tonne. L’électricité produite par ces usines est soumise à une obligation d’achat par EDF, cela assure aux agriculteurs une stabilité des prix et minimise les risques financiers. Cette obligation d’achat concerne aussi le biométhane produit. De plus, cela permet, comme nous l’avons vu, d’acheter moins d’engrais industriel, de chauffer des bâtiments, revendre l’électricité etc. Je tiens à notifier de nouveau que cela ne doit pas servir de prétexte pour baisser le prix d’achat de la production de l’agriculteur mais servir de complément de revenu.
Sources
  1. https://agriculture.gouv.fr/la-methanisation-agricole-en-questions 
  2. https://www.gazprom-energy.fr/gazmagazine/2015/04/video-comment-fonctionne-une-unite-de-methanisation/ 
  3. https://chambres-agriculture.fr/exploitation-agricole/developper-des-projets/economie-et-production-denergies/la-methanisation-agricole/ 
  4. https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/valorisation-organique/methanisation 
  5. https://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/guide-pratique-methanisation-en-10-questions.pdf 
  6. “Agricultural Reuse of the Digestate from Anaerobic Co-Digestion of Organic Waste: Microbiological Contamination, Metal Hazards and Fertilizing Performance”, publié en 2014 “Effects of anaerobic digestion on digestate nutrient availability and crop growth: A review”, publié en 2012
  7. https://www.ademe.fr/expertises/dechets/passer-a-laction/valorisation-organique/methanisation https://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thanisation 
  8. https://chambres-agriculture.fr/exploitation-agricole/developper-des-projets/economie-et-production-denergies/la-methanisation-agricole/ 
  9. https://agriculture.gouv.fr/la-methanisation-agricole-en-questions 
  10. https://agriculture.gouv.fr/tout-ce-que-vous-devez-savoir-sur-lagro-ecologie 
  11. https://agriculture.gouv.fr/label-rouge-et-methanisation-tout-est-bon-dans-le-cochon 
  12. https://www.lci.fr/planete/critiques-contre-la-methanisation-dans-le-lot-des-garde-fous-pour-eviter-une-contamination-du-milieu-naturel-2112696.html 
  13. https://association-idpa.com/blog-articles/les-usines-de-mthanisation-danger-environnemental-ou-nergie-davenir-